A travers mes guidances, j'ai eu l'occasion de croiser à plusieurs reprises, un animal qui a appris à me surprendre. L'image cliché que j'avais de lui était le besoin de protection, la lenteur, le côté gluant, la fragilité... Mais quel insecte ne semble pas fragile face aux géants que nous sommes, capables de l'écraser d'un coup de talon sans même y penser ?
L'escargot possède bel et bien une incroyable coquille dont la forme singulière a donné lieu à bien des analogies par le passé. Spirale du temps, éternité, symbole de protection pour le passage vers l'autre monde... Il peut s'y réfugier. Il peut la réparer dans une certaine mesure, comme me l'a partagé une femme dévouée à la cause animale même la plus modeste.
Sa lenteur qui n'a pas de place dans une société comme la notre est considérée comme un défaut. Je n'arrive pas toujours à me ralentir consciemment, trop souvent lancée dans une multitude d'activités toutes plus passionnantes les unes que les autres.
De plus, comme bien d'autres, je ne voulais pas être lente, jugée comme telle, c'est-à-dire associée à la paresse, à l'oisiveté, à un certain laisser-aller finalement.
Ce que j'ai appris depuis, c'est que cette lenteur a deux corollaires : la détermination et l'adhérence. Observant l'escargot au quotidien, suite à ces messages qui m'avaient mis la puce à l'oreille, j'ai pu le découvrir suspendu coquille vers le bas à une feuille si légère, gravissant un mur d'une hauteur impressionnante, arpenter une tige ployant sous son poids sans jamais faire demi-tour... Son fabuleux muscle pédestre associé au mucus qu'il produit lui permet de passer sur tous les supports et de jouer ainsi les équilibristes.
Pas raccord non plus par sa mollesse avec la finesse et la fermeté de nos corps idéalisés d'aujourd'hui. Ces spécificités signifient aussi souplesse, offrant à celui qui y transporte déjà ses organes précieux la possibilité de se contenir tout entier dans la coquille salvatrice. Grâce à cette dernière, il échappe à des prédateurs, au froid, à la chaleur.
Aujourd'hui, j'ai envie d'entrer en relation avec cet être passionnant. De rentrer moi aussi à l'intérieur et de ressentir combien je suis à l'abri dans le corps qui est le mien, sans chercher à le modifier, à le mettre à distance parce qu'il ne serait pas parfait. Il est parfait pour moi. Depuis cet espace, je me concentre sur ce qui est là, dedans comme dehors, je laisse être, vivre, je me laisse être, vivre.
Au creux de moi-même, je ressens également ma force, ma résolution, les ressources qui me permettent, le moment voulu, d'aller là où je décide d'aller et de ne pas avoir peur de tomber, de fléchir, de ne pas être à la hauteur.
Escargot sans le vouloir, je viens de mener à bien un projet d'écriture dont les 1ers essais remontent à près de 8 ans. Le manuscrit a trouvé sa forme, après de nombreuses versions ; il a été lu et discuté avec une lectrice que je remercie pour son travail minutieux et ses apports clés, le synopsis, la présentation ont été rédigés. Il est entre les mains des éditeurs à présent. Sans le savoir, c'est de la même détermination que j'ai su faire preuve dans cette expérience.
Alors qu'une nouvelle saison, une nouvelle année de projets, d'activités s'ouvrira bientôt, je prends appui sur cette sagesse là et, dans ma toute impatience si humaine, je ferai en sorte de penser à l'escargot et à son rythme bien à lui, à son chemin sur lequel il avance laissant sa trace au passage.
Myriam Bendhif-Syllas
Cœur ouvert, conscience déployée
Le 26 juillet 2022
Crédit photo. Myriam Bendhif-Syllas
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